Chaque année, une importante somme est repartie par le gouvernement entre certains partis politiques éligibles à ce fonds suivant des critères bien établis. Au regard des taux de participation aux dernières élections (présidentielle, législatives et communales), l’annonce du pactole de plus de trois milliards à repartir entre les formations politiques suscite des remous et interrogations au sein de la population.
Ces débats se concentrent le plus souvent autour de l’utilisation faite de ces fonds par les responsables des partis politiques. Pour le Malien lambda, l’aide aux partis politiques est destinée à l’enrichissement personnel des leaders politiques au détriment des besoins réels des partis politiques et des militants.
Comme indiqué par le conseil des ministres du mercredi 14 août 2019, au compte de l’année 2018, c’est un pactole de 3 374 442 789 F CFA qui va être partagé entre 66 partis politiques, au titre de l’aide publique aux partis. Cela, conformément à la Charte des partis politiques qui prévoit une aide correspondant à 0,25 % des recettes fiscales du Budget d’État.
Ce fonds est normalement destiné à diverses missions publiques dévolues aux partis politiques en conformité d’avec l’article 28 de la loi fondamentale malienne qui stipule : « Les partis concourent à l’expression du suffrage. Ils se forment et exercent librement leurs activités dans les conditions déterminées par la loi. Ils doivent respecter les principes de la souveraineté nationale, de la démocratie, de l’intégrité du territoire, de l’unité nationale et la laïcité de l’État ». LOI N° 05-047/ DU 18 AOUT 2005 PORTANTCHARTE DES PARTIS POLITIQUES est plus précis dans son préambule : « Les partis politiques remplissent une mission d’intérêt général, en concourant par les moyens pacifiques et démocratiques à la formation de la volonté politique, ainsi qu’à l’éducation civique des citoyens et des dirigeants ayant naturellement vocation à assumer des responsabilités publiques ».
Toute la question réside à ce niveau : les partis politiques du Mali répondent-ils à cette mission d’intérêt général ?
En tout cas, pour nombre de Maliens, le doute est permis. Et pour cause, les taux faibles (moins de 20 %), de vote lors de la dernière présidentielle avec son corollaire d’achat de conscience ont convaincu plus d’un que la mission « d’éducation civique des citoyens » dévolue aux partis politiques n’est pas ou est mal accomplie.
Ainsi, de plus en plus, les citoyens se montrent très critiques quant à l’utilisation de l’argent encaissé par les partis politiques chaque année. Le législateur n’a pas expressément énuméré les dépenses que devront supporter les Partis. Toutefois, les articles 10, 36 et 39 de la Charte des Partis politiques en donnent des indications : ainsi, le parti peut : acquérir et administrer des locaux et matériels destinés à son administration et aux réunions de ses membres ; acquérir tout bien nécessaire à ses activités ; éditer tout document ou périodique ; assurer la formation de ses militants…
Au Mali, l’inquiétude des populations se rapporte à l’utilisation adéquate faite de ces fonds par les partis politiques. Celles-ci reprochent aux dirigeants des partis d’utiliser l’argent public pour leur enrichissement personnel au détriment de la campagne électorale et à l’éducation civique des citoyens. D’ailleurs, cette inquiétude se justifie par le désintéressement des citoyens vis-à-vis de la politique. Cela se fait sentir à chaque élection avec un faible taux de participation des électeurs.
Malheureusement, la plupart des partis politiques ne sont visibles qu’à la veille des élections. Ce qui fait dire à un observateur qu’au-delà de toute volonté de dénigrement, des condamnations, beaucoup de nos politiciens manquent d’analyses profondes et de propositions concrètes vis-à-vis des préoccupations posées par les populations.
PAR MODIBO KONE